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Les éditions de la rue Dorion

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  • En attendant qu'on se libère
  • En attendant qu'on se libère

    Vers une justice sans police ni prison

  • Mariame Kaba

  • Préface de Délice Mugabo

  • Traduction par Frédérique Popet

  • 280 pages

  • Parution le 7 novembre 2023

  • Format 20 x 14 cm

  • ISBN : 978-2-924834-48-0

  • Prix : 31.95 $

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Pourquoi devenir abolitionniste ? À quoi ressemble l’abolition ? Comment l’appliquer quand il est question de viol ou de meurtre ? Bien que la réflexion sur l’abolitionnisme de la police et du système carcéral dans l’espace francophone se développe, les publications sur la question sont encore trop rares. La réflexion proposée par Mariame Kaba s’appuie sur une longue expérience de militantisme et une observation minutieuse, rigoureuse, lucide du système étasunien. Parce qu’elle s’autorise malgré tout une pensée imaginative, libre et pleine d’espoir, sa lecture est stimulante pour penser d’autres façons d’assurer la sécurité des membres d’une société et d’exercer une justice plus démocratique et en fait un élément clef des réflexions actuellement nécessaires sur ces sujets.

Revenant sur l’histoire de la prison et des mouvements abolitionnistes, elle montre qu’il ne s’agit pas seulement d’abolir ces institutions mortifères, mais aussi d’œuvrer pour un monde où il existerait d’autres ressources contre les violences que la punition, comme l’entraide, l’écoute et la solidarité. Pour cela, il faut être prêt·es à remettre en question toutes les logiques d’oppressions que nous avons intériorisées.

Mariame Kaba plaide ainsi en faveur de réparations pour les victimes de violences policières, de rediriger les ressources de la police vers les programmes sociaux – santé mentale, écoles, soins de santé –, d’appliquer diverses stratégies pour éloigner les gens du système pénal punitif et favoriser une justice transformatrice ou réparatrice, en rejetant ou soutenant certaines réformes (abolition des syndicats de police, retrait des policiers des communautés, désarmement de la police).

Née aux États-Unis, Mariame Kaba est une militante formée aux méthodes de l’organizing, une éducatrice et une autrice prolifique. Elle travaille sur le démantèlement du complexe industriel carcéral et la justice transformatrice. À Chicago et à New York, elle a joué un rôle de premier plan dans la fondation de diverses organisations qui luttent contre les violences à l’encontre des femmes et des filles tout en prônant la fin de l'incarcération.

Longtemps militante à Montréal, Délice Mugabo est une géographe Black féministe. Ses récentes recherches portent sur la violence esclavagiste québécoise au XVIIIe siècle et les projets politiques des femmes Noires captives à Montréal et dans les régions durant cette époque. Ses travaux portent également sur le radicalisme Noir dans les années 1990 à Montréal et l'histoire continue de l’islamophobie anti-Noire au Québec.

En Europe, cet ouvrage a paru aux éditions Hors d'Atteinte.

Recension dans la Revue canadienne de criminologie et de justice pénale (Ottawa et Toronto) et la Revue de science criminelle et de droit pénal comparé (Paris) dans leurs numéros d’avril-juin 2024

De fait, le livre de Kaba est une somme de textes et d’entrevues qu’elle a commis au cours des dix dernières années dans lesquels elle nous fait part de ses expériences et de ses réflexions sur le terrain afin d’aider les personnes noires, des femmes essentiellement, victimes de discrimination et d’abus de la part du système de justice criminel aux États-Unis.

Conjuguées à son empathie, ses compétences sont mises au service des personnes dans la perspective qu’elles puissent se regrouper afin de se soutenir les unes les autres, et de mettre en action des stratégies relatives à leurs revendications, le but ultime étant « les solutions à développer pour prévenir les préjudices futurs » (p. 211).

Sa réflexion sur l’abolitionnisme est nuancée et « repose sur une vision politique, une analyse structurelle de l’oppression et une stratégie d’organisation pratique » (p. 33). Malheureusement, cette réflexion n’est pas développée, ni approfondie, laissant le lecteur sur sa faim. En effet, dans la première partie, elle soulève plusieurs questions de fond et met en évidence des constatations comme celle-ci : « si les responsables politiques reconnaissaient que la plupart des préjudices considérés comme des infractions prennent racine dans les inégalités sociales et économiques, on s’attendrait à ce qu’ils/elles s’attaquent à ces inégalités, ce que la plupart refusent de faire » (p. 60).

Mais une fois exprimé certaines réalités, les textes se limitent à survoler des exemples sans que ne se dégage des modèles d’organisation et un fil conducteur pour la lutte. Cela tient probablement au fait que Kaba « ne ressen(t) pas d’injonction à fournir des réponses, mais (qu’elle a) le sentiment qu’il est de (s)on devoir d’inciter les gens à faire plus de choses » selon leur sentiment, tout en étant conscient que « l’échec constitue la norme, et que c’est un moyen fantastique à notre disposition de tirer des leçons qui nous aideront » (p. 230).

Évidemment, l’approche abolitionniste actuelle se vit dans un contexte social et politique qui ne se compare pas avec celle des années 1960 et 1970. En effet, les rapports de force ne mettent pas en opposition les mêmes entités économiques et politiques, la mondialisation et les technologies ayant perturbé les moyens de résistance face au désengagement de l’État responsable de la précarité grandissante au sein des populations vulnérables.

Cette situation pourrait expliquer la nécessité d’agir au niveau local, là il est encore possible d’avoir un éventuel impact, et de rendre plus difficile de porter les revendications abolitionnistes au sommet de l’État.

Jean-Claude Bernheim, expert en criminologie, Québec

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